Un Évêque rue de l'Évêché

1805 - 2005




Un article du Chanoine Daniel Meynen, Archiviste de l'Évêché,

publié dans Communications du Diocèse de Namur, Septembre 2005, pp. 340-342.





Palais épiscopal
                                de Namur, Année 1943, Archives de
                                l'Évêché
Palais épiscopal de Namur

Année 1943

Archives de l'Évêché







Le fait peut nous paraître familier aujourd'hui : l'Évêque de Namur, Monseigneur Léonard, ainsi que ses prédécesseurs, a élu domicile au numéro 1 de la rue de l'Évêché, là où se dresse le Palais épiscopal. Ce fait, cette réalité ne remonte cependant pas au-delà du 5 octobre 1805, jour où l'Évêque de l'époque, Monseigneur Pisani de la Gaude, établit pour la première fois sa demeure en ce lieu. Bientôt, le 5 octobre 2005, nous commémorerons le deux centième anniversaire de cette installation : l'occasion de nous rappeler un peu comment la Providence de Dieu a conduit l'Évêque de Namur jusque là.


Dès son arrivée à Namur, en 1562, le premier Évêque du diocèse, Antoine Havet (1513-1578), acheta quatre maisons, Place Saint-Aubain, face à la Cathédrale, et s'y installa. Ses successeurs logèrent au même endroit. En 1602, l'un d'eux, François Buisseret (1549-1615), ajouta quatre autres maisons aux demeures premières. Nommé en 1727, Monseigneur Thomas de Strickland (1682-1740), habitué aux fastes des grandes cours d'Europe, fit bâtir, vers 1730, probablement sur l'emplacement des premières maisons acquises par Antoine Havet, le magnifique Palais que l'on voit encore aujourd'hui face à la Cathédrale. Les troupes d'occupation françaises ayant investi tout le pays en 1795, et le dernier Évêque d'Ancien Régime, Monseigneur de Lichtervelde, étant mort en octobre 1796, l'administration du Département de Sambre-et-Meuse (lequel équivalait à la Province de Namur actuelle, moins les cantons de Philippeville et de Couvin) occupa le Palais de la Place Saint-Aubain dans les premières semaines de 1798.


Le 15 juillet 1801, le Premier Consul Napoléon Bonaparte et Sa Sainteté le Pape Pie VII signèrent une Convention, appelée Concordat, en vue de rétablir l'exercice du culte, sous la vigilance de l'État. Promulgué par une loi du 8 avril 1802, le Concordat, ainsi que certains articles que le gouvernement français y avait ajoutés, obligeait ce même gouvernement à pourvoir d'un logement convenant à leur dignité les nouveaux Évêques qui allaient être nommés, soit en leur rendant l'ancien Palais épiscopal, soit en leur octroyant un nouvel asile. A Namur, le Préfet du Département, Emmanuel Pérès de Lagesse, ne voulant pas quitter le Palais de la Place Saint-Aubain, où il logeait et où son administration était installée depuis plus de quatre ans, se vit obligé de chercher une autre demeure pour loger le nouvel Évêque de Namur, Monseigneur Claude-Léopold de Bexon.


Pendant le court temps de son épiscopat namurois, d'avril 1802 à octobre 1803, Mgr de Bexon (1736-1807) fut logé dans un hôtel de maître, au bout de la rue de l'Arsenal, telle qu'elle était à l'époque. Cet hôtel, qui avait appartenu au Comte de Fallais, mais qui n'existe plus aujourd'hui, était peu commode, malgré son grand jardin, et ressemblait, aux dires de Mgr de Bexon, à une mauvaise prison !


Ayant dû donner sa démission, suite à des démêlés plus ou moins provoqués avec Bonaparte, Mgr de Bexon se retira près de Metz, dans sa Lorraine natale, où il mourut en août 1807. Entretemps, le diocèse de Namur accueillait son successeur : Monseigneur Charles-François-Joseph Pisani de la Gaude. Il arriva à Namur au soir du 12 août 1804. Le 15, dans la Cathédrale, il prit possession du diocèse. Il logea d'abord, une dizaine de jours, rue de la Croix, chez un notable de la Ville. Le temps pour lui de visiter le mauvais hôtel que l'on avait destiné à son prédécesseur, hôtel dans lequel il refusa nettement de s'installer, arguant qu'il s'agissait d'une demeure fort éloignée de la Cathédrale, et bâtie dans des bas-fonds humides et souvent inondés.


Le Préfet Pérès lui offrit alors de s'installer rue de Bruxelles, dans un hôtel particulier, aujourd'hui détruit, qui faisait face à la rue Godefroid. L'Évêque l'essaya quelques jours. Mais insatisfait de cette demeure, il obtint du Marquis de Croix qu'il lui laissa une partie de son hôtel, situé rue Saint-Aubain (aujourd'hui rue J. Saintraint), pour en faire son Palais épiscopal. Mgr Pisani loua cette partie d'immeuble pour un an, de septembre 1804 à septembre 1805. Il y établit son secrétariat, y fit installer des rayonnages, et convertit une salle en chapelle épiscopale. Aujourd'hui, il ne reste aucune trace de son passage, l'hôtel étant devenu propriété de la Ville, et le siège de la Société Archéologique de Namur.


En avril 1805, le Conseil Général du Département de Sambre-et-Meuse se résolut enfin à voter l'achat d'une maison destinée à servir de Palais épiscopal. Ce même Conseil avait, jusque là, refusé d'acheter quoi que ce soit pour l'Évêque, car il manquait d'argent, et que, trois ans plus tôt, en 1802, lors de l'arrivée de Mgr de Bexon, il avait voté la location, pour trois ans, de l'hôtel de Fallais.


Le Préfet Pérès, de concert avec l'Évêque, devenu son ami, décida d'acheter plusieurs propriétés, qu'il allait réunir, pour former le nouveau Palais épiscopal. Ainsi acheta-t-il le terrain où s'élevait autrefois le Couvent des Religieuses récollectines, terrain sur lequel s'étend aujourd'hui le jardin de l'évêché. Il acquit également ce qu'on appellait alors le Refuge de l'Abbaye de Malonne, qui allait constituer la majeure partie du Palais épiscopal actuel. Enfin, il acheta une maison contiguë, et mitoyenne au Refuge de Malonne, afin d'agrandir ce dernier, du côté du Séminaire.


L'argent venant encore à manquer, partiellement du moins, ces achats ne se réalisèrent pas en 1805, mais bien l'année suivante, en 1806. Entretemps, un contrat de location du Refuge de Malonne fut conclu avec le propriétaire, un certain Lemielle. Ceci permit à l'Évêque de Namur, Mgr Pisani de la Gaude, de s'installer dans son nouveau Palais, le 5 octobre 1805, après avoir passé un an chez le Marquis de Croix.




© Daniel Meynen, 2005




Daniel Meynen, un prêtre catholique à votre service.

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